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Sweet Pain
Interview par Luc Brunot.
Traduction par Dominique Turgot et Luc Brunot.
Crédits photos : DR (Photographes inconnus en cas d'absence de mention - Photographies fournies par le groupe)
Publié dans Bands Of Dixie n°101 (novembre - décembre 2014)
Sweet Pain
Comme tous les dix ans, c'est cette année, l'Année de la musique tchèque. Si la musique traditionnelle, le jazz ou le rock ne sont pas oubliés, on célèbre avant tout les compositeurs classiques. Le rock sudiste ? Apparemment personne n'y songe alors que la République tchèque est peut-être le foyer le plus riche en matière de Southern rock en dehors des États-Unis. Non, on célèbre plutôt Antonín Dvorák, le plus fameux des compositeurs nationaux, célèbre pour La Symphonie du Nouveau monde… une œuvre qui résulte en particulier de l'éblouissement de Dvorák par la musique des noirs dans le Sud. Celle-ci sera aussi et surtout fondamentale via le blues dans l'arrivée du rock. Et elle sera à l'origine de la particularité de ce terreau culturel du Sud auquel le Southern rock doit son feeling particulier. Ce feeling, cette atmosphère, c'est ce qui séduit avant tout Sweet Pain dans le rock sudiste et guide le groupe pour tracer sa propre voie. C'est un des éléments qui ressort de cette interview réalisée alors que ce groupe fête ses dix ans (parfaitement en phase avec le rythme de l'Année de la musique !). La qualité de leurs albums, en particulier « I Believe In Your Lovin' », le nouvel opus et l'une des plus belles réussites discographiques du rock sudiste européen, classe Sweet Pain parmi les groupes les plus intéressants de notre continent. Il était temps de faire plus ample connaissance avec cette bien douce douleur. Michal Zvonícek, Petr Smutný et Jirka Cástka nous expliquent tout.
Salut Sweet Pain !
Bonjour Petr, bonjour Michal, bonjour Jiri,
Félicitations pour votre superbe « "I Believe In Your Lovin' ». Avant d'en parler, nous voudrions connaître un peu l'histoire de Sweet Pain et dont la naissance remonte à 2004. Michal, vous étiez auparavant dans un groupe qui s'appelait Druhej Dech et vous, Petr, vous étiez dans Ohniva Voda / Fire Water. Pouvez-vous s'il vous plaît nous parler de ces groupes et de vos autres expériences musicales avant Sweet Pain ?
Petr : Merci ! Je joue de la guitare depuis l'âge de quinze ans (j'en ai quarante-neuf maintenant). Je jouais auparavant au sein de Fire Water [NDLR : ce qui se traduit par Ohniva Voda en tchèque. On trouve selon les disques l'une ou l'autre des deux appellations] et dans quelques groupes, qui jouaient principalement du rock tchèque, une sorte de « rock celtique ». Mon premier groupe de rock sudiste, ça a été Fire Water ; vous savez, cet album réalisé en 2001. Ça a été un super groupe mais après le premier album, on n'a plus fait grand-chose. C'est pourquoi, j'ai rejoint Sweet Pain en 2004.
Sweet Pain : Sylva Hájek - Jirka Cástka - Michal Zvonícek - Milan Kott
J'adore cet album. La musique est super sur ce disque. Il aurait juste mérité d'avoir une production du niveau des albums de Sweet Pain. Que sont devenus les autres musiciens ? Jouent-ils encore dans un de ces nombreux groupes tchèque qui jouent plus ou moins du rock sudiste ?
Petr : Concernant la production, vous avez absolument raison. Étonnamment, pour l'album de Sweet Pain, on n'a même pas payé un tiers du prix qui fut demandé pour le disque d'Ohniva Voda. C'est sans doute dû à l'expérience acquise depuis tout ce temps. On arrive à être plus efficaces, à avoir un meilleur résultat et tout ça à moindre coût.
Tous mes anciens potes de Fire Water continuent à faire de la musique, mais pas dans le rock sudiste, sauf peut-être le bassiste.
Michal : Je chante depuis que je suis tout jeune. À une époque, j'aimais surtout les chanteurs français : Gilbert Bécaud, Charles Aznavour. J'ai commencé à jouer de la guitare à quatorze ans (j'en ai maintenant cinquante). Puis, les années suivantes, je suis passé à un mélange de rock, de dance music et de jazz. J'ai eu plusieurs groupes et même un big band de jazz. J'étais au chant et à la guitare. Ensuite, - et je le regrette - je me suis mis à jouer de plus en plus de dance music. Ça m'a conduit à faire un break musical pendant cinq ans. Après ça, j'ai recommencé à jouer mais uniquement du jazz, du blues et du rock. Petit à petit, la part de jazz a diminuée au profit du blues.
Mon premier groupe après cette pause a été Druhej Dech (batterie, basse, deux guitares, chanteuse). Il a enregistré un CD quatre titres avant que les musiciens ne se mettent à changer.
Incroyable ! Parlez-vous un peu de français ?
Michal : Non, je suis désolé, seulement quelques mots de base. Ma tante a étudié le français et ma grand-mère parlait aussi le français. Elle a vécu en Belgique quelques années entre les deux guerres. Voilà pourquoi le français était très populaire dans notre famille.
Quel était le genre musical de Druhej Dech ?
Michal : Avant mon arrivée, ils jouaient une sorte de rock plus ou moins tchèque. Ils appelaient ça du blues rock et c'est ce qui m'intéressait dans leur annonce. Mais ce n'était pas du blues rock. Il y avait peut- être un peu de blues mais il y avait surtout d'étranges progressions harmoniques. Et c'est aussi une des raisons pour lesquelles je me suis mis à composer de plus en plus ma propre musique, une musique qui est beaucoup plus influencée par le blues et le blues rock américains.
Comment est né Sweet Pain ?
Michal : Je me suis retrouvé seul avec le batteur de Druhej Dech et tous les deux on a essayé de trouver un bassiste et un guitariste qui colleraient. En fin de compte, nous avons trouvé Robert et Peter ainsi qu'un nouveau nom pour le groupe, Sweet Pain. On a commencé à donner des concerts et à écrire de nouveaux morceaux.
Plus tard, on a essayé d'ajouter des choristes féminines. Ça a commencé par ma fille Sylva. On a eu ensuite d'autres choristes qui se sont succédées. Finalement nous avons trouvé Aja qui en plus du chant est aux claviers.
Sweet Pain - The Best Of 2005
Vous avez tout d'abord publié un premier CD quatre titres, « The Best Of 2005 ». L'objectif de ce court CD était-il d'avoir une démo pour rechercher des concerts ? L'appellation « The Best Of » laisse à entendre que vous aviez d'autres chansons. Pourquoi ne pas les avoir inclues sur ce CD ?
Petr : Vous avez raison en ce qui concerne l'objectif de la démo. La démo a cependant été aussi diffusée par les radios locales. On avait une dizaine de morceaux à l'époque. On n'en a sélectionné que quatre pour des raisons de budget. On a enregistré la démo en deux jours.
Nous n'avons pas utilisé ensuite ces morceaux sur notre premier véritable album car nous en avions déjà vraiment beaucoup trop de nouveaux.
C'est seulement en 2011 que vous avez sorti votre premier album. Pourquoi cela a-t-il pris six ans ?
Petr : On a commencé à penser à enregistrer dès 2007 mais nous étions focalisés sur la recherche d'un nouveau batteur (Vlasta nous a rejoint en 2007) et d'un bassiste (Raduz est arrivé en 2009). Il a fallu un certain temps pour que tout se mette en place. Mais on n'a pas de regret. Au moins, nous avons acquis pas mal expérience dans l'intervalle et notre musique a murie comme un bon whisky.
Quels ont été les principaux événements pour le groupe au cours de cette période ?
Petr : Nous avons joué de nombreux concerts notamment lors de rassemblements moto (je suis fier d'être propriétaire d'une Harley-Davidson Dyna Wide Glide et je suis un biker fanatique), dans des clubs de rock à Prague et des festivals de rock sudiste. Dans le même temps, comme Michal est un auteur-compositeur très productif, on travaillait sur de nouvelles chansons. Il apporte sans cesse de nouveaux riffs et de nouvelles idées.
Sur cet album, « What A Sound », le line-up - sauf Jiri - est le même que celui de votre nouveau CD. Une première chose qu'on note et qui n'est pas si habituelle que ça, c'est la présence d'un percussionniste en plus du batteur. Pourquoi ce choix ?
Petr : Nous sommes ouverts à tout ce qui peut donner du plaisir. Nous ne mettons pas de limites, nous ne sommes pas prisonniers des schémas traditionnels. Vous pouvez l'entendre sur nos albums, notre musique n'est pas 100% alignée sur les clichés du rock sudiste. Nous avons nos propres spécificités. On aime faire les choses à notre manière et non pas la façon dont nous serions censés les faire.
Milan, le percussionniste était notre ami et on l'a simplement pris avec nous. Il n'y a jamais assez de rythme dans la musique. J'étais au concert en plein air de Santana à Prague en 2004.Il avait dans son groupe, en plus du batteur, deux autres percussionnistes. C'était fantastique, absolument incroyable. Dix mille personnes qui ont dansé de la première note du concert jusqu'à la dernière note du dernier rappel. Personne n'était capable de rester sans bouger. Il faut juste apprendre comment travailler avec les percussions et veiller à ce que les instruments ne se chevauchent pas trop.
Que vous fassiez les choses à votre manière n'empêche pas dans le même temps que votre musique possède de solides racines, en particulier des racines blues et Southern rock. Quelles sont les principales influences qui agissent sur le style de Sweet Pain ?
Petr : Michal est polyvalent et ouvert à beaucoup de styles ; il n'a pas de barrières. Il a quand même un feeling blues très marqué. Je suis plus orienté rock sudiste. Parmi mes groupes préférés en la matière, ceux qui m'ont influencé sont Lynyrd Skynyrd, Molly Hatchet, l'Allman Brothers Band, le Charlie Daniels Band, Van Zant (tous), Gov't Mule, l'Atlanta Rhythm Section et récemment Hogjaw.
Et en matière de guitaristes ?
Petr : En plus des guitaristes des groupes que je viens de mentionner, il y a Angus Young, Gary Moore, David Gilmour, Mark Knopfler, Ritchie Blackmore, Eddie Van Halen, Slash, BB King, Carlos Santana et bien d'autres encore.
Michal : il y a beaucoup de guitaristes que j'aime : Steve Morse, Zakk Wilde, Wes Montgomery, George Benson, Mike Stern, Robben Ford, Steve Lukather, Pat Matheny, Django Reinhardt, Stochelo Rosenberg, Eric Clapton, Robert Cray, Roman Pokorny (jazzman tchèque), Tommy Bolin, les Holmes Brothers, John Scofield, Daug Aldrich, Mark Knopfler, Jeff Retour, Joe Bonamassa, Warren Haynes, Derek Trucks...
Sweet Pain - What A Sound
Vous avez (ou avez eu) aussi deux ladies dans le groupe et elles ne sont pas uniquement là pour être cantonnées aux choeurs. Elles chantent en lead sur certains titres. Je remarque aussi qu'il y a à chaque fois des femmes mais pas d'hommes sur vos pochettes de CD. Quid de cette importance des filles au sein de Sweet Pain ? Et pourquoi n'avoir choisi d'avoir sur la pochette de « What A Sound » que les visages des ladies et pas les autres membres du groupe ?
Petr : C'est très simple : des jeunes filles sont plus attrayantes que vieux cons ! En outre, en mettant en avant nos filles, nous jouons avec le nom du groupe, Sweet Pain, pour titiller un peu.
Comme votre nouveau CD, « What A Sound » était très bien produit (quel son !) et présenté. Êtes-vous particulièrement attentif à ces aspects ?
Petr : Nous avons enregistré dans un très bon studio avec des types vraiment compétents et sympas, Zdenek Sikyr et David Pavlik du studio Hostivar à Prague. On fait particulièrement attention au son. Pour ce qui est de la pochette du CD, non, là, pas vraiment. On a fait juste comme ça, comme on fait d'habitude. On aime faire comme ça. C'est pour nous un plaisir et même une passion.
Comment le CD a-t-il été accueilli ?
Petr : De manière excellente. Ce n'est bien sûr pas de la musique grand public, du mainstream (et nous sommes fiers de ça), mais au sein de la communauté des amateurs de blues, de rock et de rock sudiste, les CD a eu un énorme succès. En plus de cela, notre ami et gourou du rock sudiste d'ici, Dalibor « Dalis » Mierva, a fait notre promo à la radio et sur quelques festivals. On tient à le remercier grandement.
Jiri, comment êtes-vous arrivé dans Sweet Pain et quelles sont vos influences ? Vous êtes plus jeune que beaucoup d'autres musiciens du groupe. Que connaissiez-vous avant de tous ces groupes tchèques jouant du rock sudiste ?
Jiri : Je connais Vlasta (notre batteur) depuis de nombreuses années ; il m'a beaucoup aidé lors de mes premières expériences musicales. Après plusieurs années à jouer de la basse dans d'autres groupes, Vlasta m'a demandé de le rejoindre lui et Michal pour un projet secondaire. Ils voulaient le créer pour garder en forme leurs doigts et leurs voix pendant les périodes où Sweet Pain a peu de concerts à son agenda. C'était vraiment super pour moi ; ça me donnait la chance de jouer avec des musiciens talentueux et sympas. J'ai aussi commencé à chanter et pas seulement comme choriste. Et comme j'aimais vraiment beaucoup ce que faisait Sweet Pain, le pas a facilement été franchi lorsqu'on m'a offert plus tard à rejoindre le groupe.
Je connaissais bien entendu les plus grands groupes de rock sudiste ainsi que les groupes tchèques. Sweet Pain bien sûr, The Cell, MBA Band ... mais pour être honnête, je n'étais pas un grand fan de rock sudiste. J'étais plus intéressé par d'autres styles mais j'en suis tombé amoureux instantanément ! Il y a tant de plaisir à jouer toutes ces superbes lignes de guitare, ces mélodies merveilleuses, à chanter, à vivre ces solos bluesy et ces solides parties rythmiques. On n'est jamais rassasié avec cette musique ! J'ai vraiment de la chance de partager ces moments « d'alchimie » avec les membres de ce groupe, qui sont en plus de super amis.
Pour ce qui concerne les influences, il y a tellement de grands musiciens ! Il serait dommage de ne pas parler de certains d'entre eux. Malgré tout, je voudrais quand même citer le type qui a eu le plus d'influence sur mon jeu et mon chant. C'est Geddy Lee de Rush.
Vous n'êtes pas seulement le bassiste, mais vous êtes le chanteur de trois des chansons du nouveau CD et vous avez êtes impliqué dans trois compositions. Votre contribution à Sweet Pain est donc plutôt importante. Votre arrivée a-t-elle conduit à une évolution de la musique de Sweet Pain ou est-ce vous qui a avez été changé ?
Jiri : J'ai le sentiment que ça a non seulement été pour moi un grand pas en avant mais qu'en même temps ça a été une bouffée d'air frais pour eux. Le groupe est composé de six membres et tout à coup vous avez un type qui arrive avec un nouveau feeling, de nouvelles idées et techniques. Je suis sûr que ce n'est pas une question d'âge ou de CV musical, c'est une question de passion pour ce genre musical et de plaisir à jouer de la musique avec vos potes. Je pense que vous pouvez clairement l'entendre sur notre nouvel album. À propos, nous rencontrons de plus en plus de jeunes musiciens qui jouent du rock sudiste. Une bonne nouvelle pour tous ceux qui s'intéressent à ça !
Quelle est l'importance de l'étiquette « rock sudiste » pour Sweet Pain ?
Petr : Elle est importante. Non pas à cause l'étiquette en tant que telle mais parce que nous nous sentons faire partie de ce courant. On aime mélanger le rock, la country et le blues. Nous aimons l'atmosphère et la liberté du rock sudiste.
Sweet Pain : Jirka Cástka
« What A Sound » date de 2011. Quand l'idée vous est-elle venue d'enregistrer de nouveau et comment avez-vous organisé la préparation de « I Believe In Your Lovin ' » ?
Petr : Ça date de 2013, lorsque Jiri, notre nouveau bassiste nous a rejoint. Sa contribution à Sweet Pain a été majeure. C'est un excellent bassiste et chanteur. Il a les capacités pour composer de la musique et écrire des paroles. C'est un super pote et il a le sens du travail en équipe. On a vite senti que nous devions aller en studio.
Est-ce le Steve Gaines de Sweet Pain ?
Jiri : Oh allez ?
Petr dit que vous, Michal, êtes un auteur-compositeur très productif. Pourriez-vous nous parler de votre manière de créer des chansons ?
Michal : J'ai deux manières de procéder :
1) Je prends la guitare, je joue des accords en chantant des trucs sans queue ni tête mais qui ont de bonnes sonorités en anglais La chanson en entier nait en quelques minutes. La plupart du temps, la première idée est la bonne ; c'est moins vrai si j'essaye de la modifier. Ça marche très bien quand j'ai fait un minimum de break musical.
2) Je joue de la guitare, je trouve un riff intéressant. Je complète ensuite le morceau en rajoutant des parties et le chant. Ça demande plus de travail ; il faut faire plusieurs essais et voir ce qui est le mieux, etc.
Les chansons qui naissent quand j'utilise la première technique sont plus mélodiques. Celles créées de la seconde manière sont plus rock ou plus intéressantes instrumentalement.
Quel est le rôle des autres musiciens après que vous ayez proposé une nouvelle chanson ?
Petr : Soit Michal nous envoie à tous par e-mail sa nouvelle idée de chanson, soit il l'apporte à l'occasion d'une réunion du groupe. Quand on est en répétition, on la joue ensemble et on se rend tout de suite compte si ça fonctionne ou pas. Ensuite, nous commençons à l'arranger et nous l'enregistrons sur notre mobile ou sur notre enregistreur Zoom. Puis, pendant l'intervalle de temps jusqu'à la répétition suivante, Michal écrit les paroles et nous terminons le morceau. C'est aussi simple que cela. Ce que j'apprécie chez lui, c'est qu'il ne se sent jamais offensé lorsque nous rejetons certaines de ses idées. Il en apportera simplement de nouvelles la prochaine fois et voilà. Pour moi, en tant que guitariste et arrangeur, c'est un songwriter de « rêve ». Il a toujours deux ou trois idées dans sa besace. Depuis notre dernier album (juin 2014), nous avons déjà trois nouvelles chansons pour le prochain album.
Combien de temps s'écoule-t-il habituellement entre le moment où nait l'idée de la chanson et le moment où vous la jouez sur scène ? Mais au fait, peut-être testez-vous le morceau sur scène avant de l'enregistrer ?
Michal : Autant que je me souvienne, le délai minimum et qui n'a rien d'exceptionnel doit tourner autour d'un mois. Lorsque nous créons un nouveau titre, nous le jouons en concert dès que possible. La plupart des chansons qu'on a enregistrées ont ainsi d'abord été testés sur scène.
Sweet Pain, ce sont sept musiciens. Est-il facile de réunir tout le monde chaque fois que c'est nécessaire (répétitions, concerts) ?
Michal : Nous sommes maintenant six [NDDLR : Andrea Tousova a maintenant quitté le groupe] et nous organisons les répétitions de manière à ce qu'on puisse avoir au moins le batteur, le bassiste et les deux guitaristes. La participation du reste des membres est plus variable. Quelques concerts sont joués avec le groupe incomplet, mais pour autant que je me souvienne, il n'a jamais manqué que les filles. Une ou les deux.
Vous êtes l'un des rares groupes de rock sudiste tchèques à chanter en anglais. Serait-il possible un jour que vous enregistriez certaines chansons en tchèque ?
Petr : Non, désolé.
Michal : Je n'ai pas l'habitude de chanter tchèque...
Sweet Pain - I Believe In Your Lovin'
En France, au moins en ce qui concerne la scène blues, il y a une opposition entre d'une part les artistes qui chantent en anglais parce que l'anglais est la langue d'origine du blues et parce que la langue française ne serait pas adaptée aux rythmes rock ou blues et d'autre part des artistes qui chantent en français parce que l'histoire dans une chanson est importante et doit donc être comprise par tout le monde. Avez-vous le même genre de querelle ans votre pays ?
Michal : Oui, la querelle est ici la même. Je le ressens d'autant plus que je suis auteur compositeur et que je souhaite créer de la musique qui se chante. Mais je n'ai rien de spécial à dire avec des mots, pas de message. Je mets au point mes paroles, il faut que je chante quelque chose mais il faut surtout que ce soit en harmonie avec la musique. La langue anglaise est idéale à cet égard. J'aime composer la musique mais je déteste parfois chercher des paroles. Je le fais parce que je souhaite chanter et non pas par envie de créer un texte en lui-même. Je n'écris les paroles que pour les morceaux qui sont acceptés par l'ensemble du groupe. Je n'écris des paroles que si je suis sûr que je vais utiliser. Je pourrais imaginer créer de la musique pour un autre chanteur que moi, mais je ne peux pas l'imaginer pour des paroles. En général, comme auditeur, je m'attache beaucoup plus à la musique. Les paroles viennent après. C'est l'exemple de ma relation à la chanson française. Je suis tombé amoureux de cette musique quand j'étais enfant et je ne savais pas qu'il s'agissait de poésie mise en musique et je ne comprenais pas ce que chantaient les artistes. J'aime de la musique du style chanson à cause de la façon de chanter de ces artistes et de l'accompagnement musical de qualité composée par de grands auteurs. Gilbert Bécaud et Charles Aznavour sont de grands musiciens, compositeurs et chanteurs, mais pas de poètes. Je les comprends très bien malgré le fait que je ne connaisse pas le français. Je ressens la force de cette musique. Je connais le texte de peut-être deux chansons mais j'en aime des dizaines d'autres tout en me fichant de l'histoire qu'elles racontent. D'un autre côté, je ne suis pas du tout intéressé par la Chanson tchèque, je n'accroche pas du tout ... je doute pouvoir compter parmi mes fans les amateurs de chanson à texte. C'est la vie...
Vous avez enregistré sur le disque uniquement des titres que vous avez composés. Avez-vous néanmoins envisagé d'inclure une reprise ?
Petr : Nous avons tellement de chansons à nous que non, on ne l'envisage pas. En concert, en revanche, nous jouons des covers. Nous avons actuellement sur notre set list « Down From The Mountain », « Come Hell Or High Water », « Look In Your Eyes » (de Molly Hatchet), « Edge Of Forever » (Lynyrd Skynyrd), « Jessica » (Allman Brothers), « Stormy Monday Blues », etc.
Surtout du Lynyrd Skynyrd et du Molly Hatchet des créés par les line-up actuel mais pas de vieux titres des années 70 et 80. Pourquoi ?
Petr : Parce que ce vieux répertoire est joué par d'autres groupes.
De combien de temps avez-vous eu besoin pour enregistrer ?
Petr : L'enregistrement a pris de sept à huit jours plus trois ou quatre jours pour le mixage.
Comment avez-vous enregistré ? Tous ensemble ?
Michal : Tout ensemble seulement pour la première prise. De celle-ci, seule la batterie a été conservée pour l'enregistrement final. La batterie était dans la salle d'enregistrement et les autres musiciens dans la salle de mixage. Ensuite, chaque instrument a été enregistré seul.
Jiri : L'avantage d'enregistrer séparément est qu'un seul d'entre nous est en train d'enregistrer tandis que le reste du groupe le soutient avec un verre de Becherovka (NDLR : liqueur emblématique du pays). On maintient ainsi un bon esprit d'équipe ?
Zdenek Sikyr, l'ingénieur, s'est occupé du mixage. Lui laissez-vous une liberté importante ou gardez-vous un contrôle important sur les choix ?
Michal : Je pense qu'on garde un contrôle important ce qui ne nous empêche pas parfois d'accepter les idées de Zdenek quand il nous dit que certaines de nos demandes pourraient gâcher tout le son.
Jiri : Il y a une chose particulière lors de cet enregistrement concernant Zdenek. Nous le remercions de nous avoir donné la chance de pouvoir utiliser un véritable orgue Hammond avec haut-parleur Leslie. On ne peut pas imaginer ce que c'est avant de l'avoir écouté en direct. Ça donne la chair de poule !
Quelle était l'ambiance pendant les sessions d'enregistrement ? Beaucoup de plaisir ou beaucoup de stress ?
Petr : Des tonnes et de tonnes de plaisir, pas de stress. Lors de l'enregistrement de notre premier album en 2011, on avait eu une journée stressante si je me souviens bien mais c'est bien la seule fois. La session de 2014 n'a rien été d'autre qu'un plaisir sans fin. Il n'y a qu'à voir nos photos et vidéos prises du studio sur notre site www.sweetpain.cz.
Jiri : beaucoup de plaisir ! Nous étions très concentrés et très productifs mais, en même temps, très détendus. Les deux ingénieurs du son, Zdenek et David, était très sympa avec nous (comme toujours). L'ambiance était tout simplement incroyable. La vidéo parle d'elle-même !
À propos de guitares, chacun de vous a son style. Petr plus avec un son gras et contemporain et Michal avec un son plus country. Pourriez-vous nous dire comment vous vous partagez entre vous les parties de guitare ?
Petr : On partage ça comme ça vient. On sait d'avance quelle sont les parties qui conviennent mieux au feeling de Michael et celles qui sont d'avantage ma tasse de thé... ou disons ma chope de bière.
Michal : Peter dit juste, je rajouterais juste que je ne veux pas jouer des parties trop difficiles quand je suis au chant.
Sweet Pain : Petr Smutný - Jirka Cástka
Ainsi que vous le dites, vous aimez jouer le rock sudiste à votre façon. D'avantage que des soli « exhibition », vous préférez développer des atmosphères sudistes ainsi que me le disait Petr dans un courriel. Pourriez-vous développer ça un peu plus ?
Petr : Quand j'étais jeune, j'étais convaincu que plus je jouais vite et longtemps, meilleur c'était. Maintenant, je suis plus sobre mais, je l'espère, plus intéressant. J'écoute tout le groupe, sa musique et je ne me mets en avant qu'aux moments où un solo de guitare ou une courte mélodie ont un sens. Regardez Mark Knopfler ou BB King, ils jouent trois quatre notes, pas plus, mais ils le font de la bonne manière et au bon moment. C'est une histoire talent et d'expérience.
En concert, jouez-vous les morceaux d'une manière proche de la version du CD ? Quelle est l'importance de l'improvisation sur scène ?
Michal : En concert, on reste assez proche de la version du disque puisqu'en fait c'est la version du disque qui est proche de la version de concert ; c'est elle qui a été la première. La plupart de nos solos instrumentaux sont plus de moins improvisés.
Jiri : Exactement. En tant qu'auditeur, j'aime qu'en concert mes groupes préférés jouent leurs morceaux tout simplement de la façon dont ils les ont enregistrés. Sur scène, je tente de faire de même.
Pour en revenir aux paroles, les sujets des chansons de Sweet Pain font-ils aussi preuve d'originalité ?
Michal : Je ne pense pas, l'amour est pas un thème original. Mais c'est un thème que j'aime et j'écris ce que j'ai en tête : l'amour et les femmes.
Jiri : Je ne sais même pas si on a un texte qui ne soit pas lié à l'amour et aux femmes. Mais existe-t-il un meilleur thème que celui-ci ? ?
Comment trouver le CD ? Dans les magasins ?
Petr : Non, pas en magasin. C'est trop compliqué et cher dans notre pays. Les coûts avaleraient les recettes. On vend plutôt lors des concerts. On l'envoie aussi par la poste ou en mp3.
Ce nouveau disque a-t-il le même succès que le précédent ?
Petr : Parmi nos fans et au sein de la communauté Southern rock : OUI !
Vendez-vous en dehors de la République tchèque et le groupe est-il connu à l'étranger ?
Petr : Nous sommes soutenus par Dalibor « Dalis » Mierva et aussi par le président de notre communauté locale - que vous connaissez - Pavel Hartl. Ils font notre promo en Pologne et aussi un peu en Hongrie. Le plus grand soutien que nous avons, c'est en France, grâce à vous (Un grand MERCI à tous ceux que je viens de citer).
J'ai cru comprendre que Sweet Pain possède un fan club et que les relations entre celui-ci et Sweet Pain sont dynamiques. Un exemple, c'est la photo qui orne la pochette de l'album et qui est le fruit d'un concours. Avez-vous beaucoup de fans ? Pouvez-vous nous dire quelques mots sur vos relations avec votre fan club ?
Michal : Le rock sudiste n'est pas une musique maistream en République tchèque et le nombre de nos fans correspond à cet état de fait. Le nombre de nos fans augmente mais une partie considérable d'entre eux sont des fans de rock sudiste. Un truc intéressant à noter, c'est que notre musique est bien mieux acceptée par les auditeurs « ordinaires » étrangers que tchèques, pour lesquels cette musique n'est pas « In ».
Sweet Pain : Vlasta Moutelík - Milan Kott
Est-il facile de trouver des dates pour jouer ? Combien de concert donnez-vous chaque année ?
Petr : Ce n'est pas vraiment un problème. On donne de quinze à vingt concerts par an.
Jouez-vous parfois en dehors de la République tchèque ?
Avez-vous partagé l'affiche avec des groupes américains de rock sudiste ?
Petr : Malheureusement non.
Certains groupes tchèques sont-ils spécialement proches de Sweet Pain ?
Petr : Nous formons ici une grande famille du rock sudiste. Nous avons beaucoup d'amis mais deux groupes sont plus particulièrement proches de nous : The Blackies et Full House. Nous partageons régulièrement la scène avec eux.
Que jouent les Blackies et Full House ? Du rock sudiste également ? Ont-ils des enregistrements à leur actif ?
Petr : Les deux groupes proviennent du défunt MBA Band, qui a été une icône du Southern rock tchèque pendant de nombreuses années. Le groupe s'est séparé pour quelque raison et le split a débouché sur la naissance de deux nouvelles formations. Les deux jouent du rock sudiste. The Blackies ont leurs propres titres ainsi que quelques covers. Ils ont enregistré récemment un très bon CD. Full House joue seulement des reprises et a peu enregistré.
Andrea Tousova a quitté le groupe pour son propre projet. Prévoyez-vous la remplacer ?
Michal : Non, l'ambiance de travail dans notre groupe est actuellement fantastique. Il ne nous manque un instrument harmonique (guitare ou clavier) que dans les moments où nous voulons jouer des solos de guitare à deux voix et la seule harmonie provient alors de la basse. On est en train de convaincre Sylva de jouer un peu de claviers ou de guitare.
Quels sont vos projets et vos rêves ?
Michal : Jouir ensemble de notre musique mais aussi avec nos fans de plus en plus nombreux. Le prochain CD bien sûr. On a déjà du matériel pour ça.
Jiri : Je pense que nous sommes très heureux de la façon dont les choses se passent maintenant. Bien entendu, nous voulons que le prochain CD soit encore mieux et nous espérons voir encore d'avantage de fans à nos spectacles. Mais l'élément le plus important est de préserver la joie de jouer cette musique que nous aimons ensemble comme des amis. Le reste viendra tout seul.
Petr : « Keep Southern rockin' » dix nouvelles années (au moins);-))
Un prochain album est-il déjà prévu pour Sweet Pain ?
Petr : Oui, nous prévoyons ça pour dans un ou deux ans. Nous avons déjà pas mal de nouvelles chansons.
Souhaitez-vous ajouter quelque chose de plus
Petr : Oui, nos plus vifs remerciements pour l'intérêt que vous portez à notre groupe et à notre musique et un grand merci pour votre soutien.
Sweet Pain : Petr Smutný - Vlasta Moutelík - Sylva Hájek - Jirka Cástka - Andrea Ája Toušová -Michal Zvonícek - Milan Kott
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