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Gary Jeffries
Interview par Luc Brunot.
Traduction par Dominique Turgot et Luc Brunot.
Publié dans Bands Of Dixie n°83 (novembre - décembre 2011)
Bands Of Dixie n°83
Le point commun entre Asphalt Ballet, Coup De Ville, les Regulators, Alligator Stew ? Gary Jeffries bien sûr ! Voilà un rocker attachant, sincère et sans compromission, un artiste qui ne calcule pas et se donne entièrement à la musique qu'il aime... le rock sudiste ! À Bands Of Dixie, on a beaucoup aimé discuter avec celui qui signe probablement le meilleur album de Southern rock de l'année.
Bonjour,
Vous vous êtes fait connaitre avec Asphalt Ballet. Quel fut auparavant votre parcours musical ?
Avant Asphalt Ballet, j'ai été très occupé. Par où commencer ? Bon, le premier concert dont je me souviens, c'était un concours d'amateurs 4-H (le concours des jeunes) au champ de foire de Reynolds, dans l'Indiana. J'avais probablement autour de treize ans. Je jouais de ma guitare Silvertone depuis environ un an ou deux. Je me souviens avoir appris des morceaux comme « Dirty Water » des Standells, « You Really Me Go » des Kinks, peut-être « Sunshine Of Your Love » de Cream.
J'ai monté un trio que j'ai appelé The Gallaways. C'étaient des amis de The National Homes, le coin où j'habitais. On jouait dans ma cour ou, quand mes parents ont en eu marre de nous entendre, dans le garage de mon bassiste - c'était la maison de Did Landrum. Jim Ware, mon batteur, habitait à côté. On jouait après l'école et le week-end. Nous avons joué localement, dans notre ville natale à The Armory, au Centre de Jeunesse et, rapidement, pour les soirées de danses du lycée. Les choses progressaient : plus de concerts et des agendas plus remplis. C'est à cette époque que j'ai commencé à voir la musique prendre une part plus importante dans ma vie ; une carrière que je prenais au sérieux. (C'est la phase où vous voyez les vrais musiciens prendre leur envol et les musiciens moins accros disparaitre lentement.) Après quelques années, Jim Ware a quitté le groupe. J'ai pris un nouveau batteur, ajouté un autre guitariste ainsi qu'un claviériste et j'ai rebaptisé le groupe du nom d'H.O. Brown. Bientôt, on a ouvert pour des groupes comme REO Speedwagon et Cheap Trick. J'étais sérieux sur le plan musical et c'est à cette époque que j'ai décidé que je voulais être une rock star et ça pour le reste de ma vie.
Gary Jeffries
C'étaient les années soixante-dix. Nous reprenions des hits du top 40 pour être engagés par les organisateurs et on y mettait dix de nos propres morceaux, lesquels nous avions d'ailleurs enregistrés (je les ai encore). On jouait dans les clubs avec reprise obligatoire de titres du top 40, de quatre à six jours par semaine, quatre heures par nuit. H.O. Brown jouait dans un style Southern rock avec des influences de groupes en provenance du Midwest comme Night Ranger, Styx, Head East, Ted Nugent et aussi de groupes du Sud, comme Molly Hatchet et Lynyrd Skynyrd.
Le groupe gagnait en maturité alors qu'on passait nos vingt ans. Certains membres du groupe sont partis à l'Université, d'autres membres voulaient s'installer en se mariant et en jouant seulement quelques fois par mois. Il y a eu encore d'autres changements. Mais je voulais être une rock star ; j'ai donc joué dans plusieurs groupes de reprises, en faisant des concerts toute la semaine pour payer les factures mais aussi pour améliorer mon chant et mon jeu de guitare. C'est alors que j'ai commencé à m'intéresser d'avantage aux groupes de rock sudiste comme Lynyrd Skynyrd, Molly Hatchet, Blackfoot et Marshall Tucker. J'ai aussi commencé à écouter Bob Seger et Credence Clearwater Revival (CCR.) J'adorais la guitare slide et je menais un groupe avec trois guitaristes. J'étais fou des groupes de Southern rock et j'étais prêt à aller plus loin dans ma carrière.
À la fin des seventies, j'ai fini par déménager en Louisiane. Je voulais entrer en contact avec un groupe de rock sudiste qui aurait une slide bluesy et une sorte de feeling très swamp. J'ai jammé avec beaucoup de grands musiciens et de groupes mais ça ne s'est jamais matérialisé. J'ai rencontré le guitariste Danny Whitherington à l'époque où il avait un trio du nom de Coup De Ville, qui jouait tous les week-ends. Ça faisait plusieurs années qu'ils étaient dans le coin mais ce fut mon premier contact avec Coup De Ville. C'est plusieurs années plus tard, en fait, que nous avons joué ensemble et fait un CD. Ils faisaient beaucoup de Stevie Ray Vaughn et de la musique aromatisée au blues mais ils n'ont jamais joué de la musique de leur propre composition. Je les ai toujours admirés.
J'étais prêt à saisir une autre opportunité et je me suis laissé pousser les cheveux pour déménager à Los Angeles. J'avais entendu dire que Quiet Riot auditionnait des chanteurs. J'ai voulu voir si je pouvais avoir le job. J'ai alors discuté avec ma petite amie, Cindy (qui est maintenant ma femme) pour savoir si elle voulait partir avec moi à L.A. On est parti en 1984 avec la Sunbird de Cindy et tout ce que nous possédions. J'ai fait deux auditions avec Quiet Riot mais je n'ai pas été embauché. Nous sommes cependant restés en Californie et j'ai continué à poursuivre mon rêve musical. C'était l'époque où Ratt et Motley Crew étaient sur le devant de la scène. Je n'étais pas convaincu par ce style musical mais il semblait que c'était à la mode. Si je voulais être une rock star, je savais que je ferais mieux d'y arriver rapidement même si ça s'est avéré être une erreur.
J'ai coupé ma moustache et ma barbiche pour incorporer un groupe du nom de Passion. Bon, en bref ce n'était pas moi. Nous avons joué des concerts avec Warrant, Saint Valentine et d'autres groupes similaires. Ce n'était tout simplement pas ma tasse de thé. J'ai continué à jouer avec plusieurs groupes du California Sunset Strip avant d'atterrir dans Asphalt Ballet. J'étais dans un studio de répétition de Los Angeles pour passer une audition avec le guitariste Alex Masi lorsque le propriétaire a annoncé que le groupe Mistreated auditionnait des chanteurs. Ces gars-là cherchaient à s'éloigner du son « poppy glam » pour quelque chose de plus amusant, original et intéressant. J'ai fait une audition et j'ai obtenu le poste. Mistreated est vite devenu Asphalt Ballet.
C'était une longue réponse mais ça a été un long trajet pour moi pour en arriver là.
Gary Jeffries
Dans une interview à Rock Hard il y a quelques années, vous disiez « La presse nous voyait comme un groupe de quatre "métalleux" d'Hollywood derrière un chanteur rock sudiste ». Qu'est ce qui définit un chanteur de rock sudiste ?
Oui, cette citation a été publiée dans le magazine « Screamer » ou peut-être était-ce dans « Rock City News » - les deux sont des magazines musicaux à diffusion locale de la région de Los Angeles et d'Hollywood. Je pense que la presse musicale locale a fait ce commentaire parce que je ne chante pas comme les hurleurs et chanteurs locaux au chant maniéré. Je montais sur scène avec un chapeau de cowboy cabossé, en chantant dans un style à base de blues mais plus soul. J'étais un chanteur qui a apprécié de faire ça à ce moment-là et j'aimais nos fans.
Un chanteur de rock sudiste est pour moi quelqu'un qui chante avec son coeur et son âme. Il chante des histoires basées sur la vie réelle et pas seulement des histoires inventées afin de coller au style du moment. Une chanson de rock sudiste est une histoire tirée de sa vie et qui est chantée avec douleur et passion. Un chanteur de Southern rock a une voix qui est grainée au whisky, soit parce qu'il a trop fait la fête, soit qu'il y a noyé sa peine. Un vrai chanteur de rock sudiste sera toujours un chanteur de rock sudiste. Il ne modifie pas son style pour coller à ce qui passe à ce moment-là à la radio. Il reste fidèle à lui-même et au Southern rock. Je pense qu'un chanteur de rock sudiste est attaché aux notions de famille et de sens de la famille. Il s'en occupe. Je ne pense pas qu'un vrai chanteur de Southern rock se renierait. Il n'irait pas changer de style pour la simple raison qu'il n'y a pas de marché pour ce style. Il voudra sans doute que vous aimiez sa musique car elle vient vraiment du coeur. Voilà comment je définis un chanteur de rock sudiste. Beaucoup ont disparu mais je pense qu'ils pourraient bientôt refaire surface. La musique country tente d'avoir un son Southern rock mais ce n'est pas vraiment ça.
Quelles sont vos influences, en particulier au niveau des chanteurs ?
Mes influences sont inhérentes à mon parcours ainsi qu'il en fut pour les pionniers du rock sudiste. Il y eu d'abord Elvis Presley, que dans ma famille on écoutait toujours sur disques et à la radio. Puis vinrent des artistes comme Chuck Berry et bientôt les Beatles. J'ai le souvenir d'avoir aimé des groupes tels que les Rolling Stones, les Kinks, les Animals et les Yard Birds ; des chanteurs comme Mick Jagger, Ray Davies, Eric Burdon ainsi que des groupes anglais des débuts avec leur son bien à eux. J'ai aussi aimé Jim Morrison des Doors, Bob Seger, Creedence Clearwater Revival (CCR) et bien sûr Ronnie Van Zant de Lynyrd Skynyrd. Ils ont tous eu une grande influence sur moi lorsque j'ai développé mon propre style.
J'ai adoré Skynyrd dès qu'ils sont apparus. J'ai acheté une Gibson Explorer marron en en 1976 après avoir vu qu'ils l'utilisaient dans leur groupe. Je pense que c'estAllen Collins qui en jouait. C'est à cette époque que j'étais vraiment en train de trouver mon propre style et à être d'avantage moi-même vocalement. Et, je voulais commencer mon propre truc.
Vous étiez semble-t-il le seul à tirer le groupe vers le rock sudiste. N'était-ce frustrant ou était-ce un souhait pour vous de mélanger ces différentes influences ?
Je voyais un important potentiel de rock sudiste dans Asphalt Ballet. Certes, c'était un groupe de rock orienté hard. Ils avaient deux grands guitaristes qui travaillaient très bien ensemble - deux guitaristes de style différent et qui avaient de supers sons. D'ailleurs, la plupart des groupes de rock sudiste ont au moins deux guitaristes. On avait un batteur très simple qui frappait très fort ainsi qu'un bon bassiste. On écrivait des chansons basées sur le réel et de bonnes histoires ; certaines étaient des histoires vraies. Je chantais comme j'aimais chanter. Je lançais peut-être quelques cris mais ça restait basé sur le blues. On faisait une superbe version du « Wishing Well » de Bad Company / Blackfoot. Ce fut une époque amusante. C'était l'ère de groupes comme Slaughter, Scorpions, Damn Yankees, Skid Row, Bullet Boys, Mr. Big, Cinderella et London Quireboys. Il n'y avait pas beaucoup de chanteurs de rock sudiste dans ces groupes. Nous étions différents de beaucoup de ces groupes de la fin des années quatre-vingt et du début des années quatre-vingt-dix. Les gens sur Hollywood Sunset Strip ne savaient pas si nous étions cool ou non, si nous pouvions être le prochain grand groupe. J'aimais ça, j'étais moi-même et tout ça faisait que toute chose était OK. Tu dois être sincère avec toi-même. Je l'ai toujours été et je le serais toujours.
Gary Jeffries
Quand avez-vous quitté le groupe ?
Eh bien je pense que j'ai quitté Asphalt Ballet fin 1992 ou en 1993. On était en tournée depuis presque un an. Je me souviens quand nous avons fait notre premier clip pour MTV, "Soul Survive". Notre producteur, Sam Bayer, nous avait dit qu'il revenait juste de Seattle après avoir fait une vidéo pour un groupe étrange du nom de Nirvana. C'était le « Teen Spirit » de Nirvana, une vidéo avec des tons jaunes et un côté rugueux. Notre vidéo avait une saveur semblable à celle de « Teen Spirit » grâce à Sam qui produisit les deux. Pour l'anecdote, notre manager de l'époque avait été approché pour gérer Nirvana mais avait choisi de décliner l'offre pour ne travailler qu'avec nous. Quoi qu'il en soit, ce groupe, Nirvana, et leur vidéo « Teen Spirit », ont totalement bouleversé la scène musicale. Tout le monde n'écoutait plus que Nirvana, les groupes de grunge, la musique grunge. Les maisons de disques étaient prêtes à sauter sur ce style de musique qui allait être à la mode et à se débarrasser des autres groupes. Je me suis rendu compte que notre label, Virgin Records, ne nous soutenait plus parce que nous n'étions pas un groupe de grunge.
Ma femme est tombée enceinte - de moi bien sûr - et j'ai demandé 500 dollars à mon label pour m'aider à payer une facture du médecin. Si vous connaissez des salaires de rock star, vous devez savoir que nous pouvions nous faire 150 dollars par semaine sans pouvoir bénéficier d'avantages en matière d'assurance santé ou quoi que ce soit. Mon label m'a dit qu'il « ne pouvait pas prendre soin des enfants des rock stars ». J'ai dû donc prendre un emploi régulier pour subvenir aux besoins de ma famille. J'ai directement quitté le bus de tournée d'Asphalt Ballet pour aller chercher un emploi régulier à Monroe, en Louisiane. J'étais là, à travailler dans un centre commercial et je voyais parfois sur MTV ma vidéo de « Soul Survive » ainsi que deux autres d'Asphalt Ballet. Allez comprendre !
Après que j'ai quitté le groupe, je pense qu'Asphalt Ballet a essayé de changer pour s'adapter d'avantage au style grunge de Seattle, le nouveau style à la mode. Je me souviens avoir lu dans une de leurs interviews qu'ils disaient qu'ils ne voulaient plus d'un chanteur avec une voix bluesy ou soul. Quand ils ont embauché un nouveau chanteur et enregistré un nouveau CD, la maison de disques les a immédiatement virés. Virgin Record n'était plus intéressé par le hard rock et les groupes de hard rock... et donc bien sûr par Asphalt Ballet.
J'ai écrit le morceau «Southern Pride » lors du trajet de retour de mon dernier spectacle avec Asphalt Ballet. Lisez les paroles : ça parle de moi pensant que j'étais fou de quitter un groupe qui tournait et avait une vidéo populaire sur MTV. Des gens me disaient « Tu es fou ! ». Ce n'est pas vrai. Si un label de plusieurs millions de dollars ne pouvait pas verser de d'argent pour juste un peu d'aide médicale, je ne voulais rien à voir avec eux. Et je referais ça de nouveau si ça se représentait. Mais « Southern Pride », présent sur mon nouveau CD « Middle Class Man » parle de toute cette époque.
Ensuite, en Louisiane, vous avez rejoint Coup De Ville. Combien de temps a duré l'aventure ?
Coup De Ville était un trio qui jouait des reprises partout dans le Sud. Je les ai rencontrés à la fin des seventies avant de déménager à Los Angeles dans les années quatre-vingt. Après avoir quitté Asphalt Ballet en 1993, j'ai commencé à jammer avec Coup De Ville. C'était fun et le groupe continuait à être très occupé à faire des covers et à jouer dans des bars top 40. Mais ils n'avaient pas assez de temps pour des compositions originales alors j'ai décidé de revenir à L.A. vers 1994. J'avais toujours la fièvre californienne. Je devais y revenir.
En 1995, Danny Witherington m'a appelé à Los Angeles. Coup De Ville voulait venir à Los Angeles et j'ai pensé que c'était vraiment super. Ces gars-là avaient toujours été ensemble et ils étaient très unis. Je pensais que Los Angeles aimerait ces véritables rednecks louisianais. J'avais hâte d'entendre leurs nouveaux morceaux. Eh bien, quand ils sont arrivés à Los Angeles, ils n'avaient que deux compositions originales alors qu'ils voulaient enregistrer un album complet en deux semaines de temps. J'avais quelques nouvelles chansons sur lesquelles j'avais bossé lors d'une récente jam session avec quelques amis. J'ai montré à Coup De Ville ces nouvelles chansons, « Rose Thorn Bed », « California Cowboy », « Southern Pride » et « Free My Soul » (« Free My Soul » est repris sur mon nouveau CD « Middle Class Man »). On a aussi rapidement écrit quelques nouveaux morceaux dans mon garage.
Pendant les dix autres jours où ils ont été à Los Angeles, nous avons écrit, répété, préparé des choses et monté un studio d'enregistrement. Nous avons enregistré un CD de qualité en quatre jours ! Notre CD, « La. To L.A. », s'est fait très rapidement. Le groupe est retourné à Monroe, en Louisiane, et n'est jamais retourné à Los Angeles. Ils étaient satisfaits de faire ces concerts de reprises durant quatre heures et en ayant maintenant un nouveau CD. Je pense que Coup De Ville a pressé quatre cents copies du CD et n'en a depuis jamais re-pressées. C'était un super CD mais peu de gens l'ont entendu.
Coup De Ville joue toujours en trio en Louisiane. Des supers types et un bon groupe.
Scott Redding et Gary Jeffries
En 2001 est donc sorti « La. to L.A. ». Quel était le line-up sur ce CD ?
À la lead guitare, il y avait Danny Witherington, à la batterie, c'était Dave Reeves et à la basse Robbin Antly. Chris Turbis des Regulators a joué quelques parties de clavier ; je joue de la guitare rythmique et je suis au chant. Le disque enregistré donc en 1995, est sorti aux alentours de 2001.
Quand avez-vous rejoint les Regulators et pourquoi ?
En fait, j'avais commencé à jammer avec les Regulators quelques années après Asphalt Ballet lorsque j'étais revenu de Louisiane à Los Angeles. Une compagnie de management nous avait présentés. Ils semblaient être un groupe de rock sudiste bien établi et peut-être ce que je cherchais mais on ne sait jamais si les bottes vont vous aller avant de les essayer. Ça n'a jamais vraiment collé. Je savais ce que je voulais dans un groupe de Southern rock. C'était du bon mais pas tout à fait le bon groupe pour moi.
Qu'est-ce qui ne vous convenait pas chez les Regulators ?
Je sentais qu'ils avaient déjà écrit la musique qu'ils voulaient pour un nouveau CD. Ils n'étaient pas vraiment ouverts à de quelconques modifications des mélodies ou des paroles. Je ne sentais pas trop les mélodies qu'il y avait sur ces morceaux. Je voulais vraiment ajouter mon style personnel à celui des autres musiciens mais je ne pense pas qu'eux le voulaient. J'avais le sentiment que je chantais simplement une nouvelle fois des covers. De plus, il semblait que le groupe allait connaitre des changements qui ne semblaient pas être positifs pour moi. Je voulais avoir d'avantage de responsabilités ; pas seulement chanter et jouer leur musique... alors je suis parti pour faire mon propre truc.
Pour « Bar & Grill » (réédité sous le titre « Above The Law »), vous tenez la guitare rythmique et ne chantez qu'une fois. Était-ce frustrant pour un chanteur comme vous ?
Non, pas vraiment. C'était pour le fun et plutôt pour dépanner le groupe. J'ai aimé jouer de nouveau de la Gibson Explorer brune dans un groupe de Southern rock. Il n'y avait aucune pression mais je savais au fond de moi que j'avais vraiment besoin de former mon propre groupe. J'ai chanté plusieurs de leurs morceaux sur un EP intitulé « Real Deal » qui n'a jamais été publié. Je ne le sentais pas. Il y a trois de ces chansons que je chante sur « Bar And Grill » : « Burn Them Bridges Down », « Above the Law » et « Lies ». [NDLR : les deux versions du CD ne créditent Gary Jeffries au chant que pour « Lies » mais il chante bien en fait ces trois morceaux] C'était un bon CD.
Je chantais aussi « Eatin crow » et « Real Deal » sur ce qu'ils appelaient leur EP. C'était un cinq titres [NDLR : Gary Jeffries est au chant sur tous les morceaux]. J'avais vraiment bossé à fond « Real Deal »
Le disque est sorti en 1998. Il venait d'être enregistré ou datait-il déjà de quelques années ?
Certains morceaux que je chante sont de 1995 ou 1996. Ronnie les a chantés de nouveau en 1997 ou 1998. En fait, les morceaux ont dû être enregistrés entre 1995 et 1997. Les Regulators sont passés par pas mal de changements de personnel et des moments d'instabilité.
Quel était le public des Regulators ?
Les bikers aimaient les Regulators. On avait le même public qu'ont Lynyrd Skynyrd, Molly Hatchet et Blackfoot. On avait un public qui buvait sec et qui était bruyant.
Gary Jeffries
Jouaient-ils uniquement dans les bars et les clubs ou parfois pour des publics plus importants ?
Les Regulators jouaient la plupart du temps dans des clubs et des bars. De ci de là, nous avions des concerts plus importants. Je pense que les Regulators ont eu leur meilleure période au début des années 1990, lorsque le guitariste Jimmy Hughes était dans le groupe et qu'ils étaient chez Polydor Records. Jimmy Hughes a tragiquement été abattu par arme à feu après un concert. Cela a provoqué un grand changement chez les Regulators. Jimmy était le noyau du groupe. Après sa disparition, je ne suis pas sûr qu'ils aient jamais retrouvé le bon line-up. C'était un très bon groupe mais il leur a peut-être manqué l'alchimie parfaite après la disparition de Jimmy.
On n'a pas ici trop d'infos sur l'histoire des Regulators. Pouvez-vous nous en parler un peu ?
Eh bien, les Regulators étaient vraiment un tas de types qui buvaient sec et qui menaient une vie de fêtards. On a laissé parfois l'abus d'alcool ruiner quelques-uns de nos grands moments. Parfois, au lieu de répéter, nous buvions et discutions... même si je ne me rappelle pas toujours de quoi nous avons parlé.
Le groupe avait de supers musiciens avec un grand manager, Ray Carver. On jouait dans les rassemblements de motards et pour quelques concerts très cool de Southern rock. Les Regulators étaient un grand groupe de rock sudiste.
Quand et comment s'est créé Alligator Stew ?
Vers 1995, j'avais rencontré cet incroyable joueur de slide guitare swampy qu'est John Andrews. Il jouait de de superbes licks à la guitare et je mettais des mots là-dessus. Il connaissait un batteur nommé Pappy, qui faisait un peu penser au batteur de Cream, Ginger Baker. C'était à peu près l'époque où Coup De Ville était venu enregistrer à LA et où je commençais à m'intéresser aux Regulators. J'avais donc trois choses sur le feu, tout en essayant en plus de monter par ailleurs mon propre groupe. John, Pappy et moi avions toujours un enregistreur bon marché branché et on enregistrait presque tout ce que nous faisions. C'était juste des jam sessions sur bande et qui plus tard sont sorties sur le CD des Grouchy Rooster, « Real And Raw ».
Mon cousin, Doug Richardson, lui aussi un Southern rocker, venait de déménager à Los Angeles. Je lui ai alors demandé s'il voulait jammer avec un nouveau groupe que j'étais en train de monter. Il a dit « bien sûr! ». Nous avions alors quatre membres du groupe qui allait devenir « Alligator Stew ». Nous avions besoin d'un clavier et j'ai alors demandé à Chris Turbis de nous rejoindre mais il était trop occupé avec les Regulators, puisqu'il les aidait à terminer l'enregistrement de « Bar And Grill ». Finalement, nous avons trouvé cet incroyable claviériste qu'est Danny Bierne. Il est un peu comme la rencontre de Jerry Lee Lewis et de Billy Powell (Skynyrd) ! Pappy est parti pour un autre groupe et on a pris un autre batteur qu'on a déniché dans le magazine d'Hollywood, Music Connection. T.C. Markle a été la dernière pièce du puzzle.
Nous avons commencé à jouer du rock sudiste à Hollywood puis à Los Angeles. Le public nous aimait grâce au changement que nous apportions ! Ils étaient fatigués du grunge et du metal. Nous vendions tout ce qu'on proposait sur Sunset Strip et on obtenait de bonnes critiques en jouant du rock sudiste basé sur un répertoire personnel. Nous avons rapidement fait notre premier CD, « Alligator Stew », qui est sorti chez CD Baby et sur un label allemand, Halycon Records. Halycon a refait le packaging du CD, a ajouté deux chansons et l'a republié sous le titre « A First Taste of Alligator Stew ». C'était bien. Nous n'avons pas fait de profits financiers mais on a passé un bon moment. Notre CD a été mondialement disponible au milieu 2008 - ou peut-être plus tôt - et c'était très cool.
On a enregistré l'un de nos importants concerts à Monticello, dans l'Indiana et on l'a sorti en CD. C'était « Welcome To Monticello LIVE ». Nous y avons inclus quelques nouveaux morceaux mais c'était surtout un concert fun que nous voulions faire partager à nos fans du monde entier. Nous avons produit notre propre vidéo musicale avec l'aide de K.C. Amos et Steve Mullsberry. Ça s'appelle « Blood Money » et ça tournait sur Country Music TV (CMT) et sur Great American Country (GAC) TV. Vous pouvez le voir sur mon site www.garyleejeffries.com, avec mes autres vidéos.
C'est à cette époque que mon père est tombé très malade. Il avait un cancer. J'avais passé tant d'années à poursuivre mon rêve du rock 'n roll que je n'avais passé que très peu de temps avec ma famille. Mon père avait à peine vu mes enfants. J'ai senti profondément qu'il fallait que j'aide mon père et que je permette à ses petits-enfants à apprendre à le connaître. Ma mère était décédée du cancer quand j'étais plus jeune, alors que j'étais trop occupé à jouer à la rock star pour passer assez de temps avec elle. Quand mon père est tombé malade, il n'était pas question de laisser passer un moment important avec lui comme je l'avais fait avec ma mère. D'ailleurs, « Middle Class Man » est dédié à ma maman.
Je suis revenu dans le Midwest pour être près de mon père et j'ai laissé derrière mois toute la musique et Alligator Stew. La famille avant tout. Mais Alligator Stew a été un grand groupe de rock sudiste swampy.
Gary Jeffries
Vous avez mentionné un autre groupe, c'est Grouchy Rooster (« Real And Raw » en 2003). Pouvez-vous nous en dire quelques mots de plus ?
Grouchy Rooster était groupe de jams. Plus haut dans cette interview, j'avais dit que lorsque je travaillais avec les Regulators, j'avais écrit avec cet incroyable guitariste slide, John Andrews, et le batteur Pappy. Les bandes et les séances de répétition que nous avons enregistrées sont devenues plus tard le CD « Real And Raw ». On trouvait que ces enregistrements avaient quelque chose de cool. Le disque n'a pas été vraiment produit ; c'étaient simplement des répétitions brutes qu'on enregistrait afin de nous souvenir de nos morceaux. Certains morceaux de « Real And Raw » ont été faits en une prise et on y a laissé les erreurs. J'ai joué de la basse sur quelques morceaux. Pappy a commencé à se plonger plus avant dans tous ces enregistrements afin d'en extraire certains. On faisait parfois dix fois un morceau, voire plus, avant de passer à un autre. On avait donc quelques prises correctes pour quelques chansons.
Ce groupe a été un projet qui a mené à Alligator Stew. Certains titres du « Real And Raw » de Grouchy Roosteer se sont retrouvés sur les CDs Alligator Stew : des chansons comme « Louisiana Man », « You Gotta Give », « Far Beneath The Rubble » et peut-être quelques autres. Je ne sais pas si nous avons eu raison de publier « Real And Raw ». C'était un enregistrement sans production à une époque où Alligator Stew se formait. Ha ! Grouchy Rooster, ça a été beaucoup de fun. C'est le seul groupe de ce type - qui était juste un groupe de répétitions funs - qui ait fini sur CD.
Et vous avez eu encore beaucoup de groupes comme ça ?
Attends ! J'ai oublié : j'ai enregistré probablement vingt morceaux avec Danny Clarke, le guitariste d'Asphalt Ballet. Ensemble, on a enregistré quelques morceaux vraiment géniaux. Leur style et leur son étaient une sorte de croisement entre Asphalt Ballet et le Southern rock. « Flowers On My Grave » et « Free My Soul » sur « Middle Class Man » ont tous deux été composés avec l'aide de Danny Clarke. On n'a pas fait beaucoup de concerts mais on a fait pas mal de composition et d'enregistrements. On n'a pas pu à l'époque trouver les musiciens qui convenaient. Je sortirais un jour - bientôt - quelques-uns de ces morceaux. Alors préparez-vous ! Je pense que j'en ai envoyé quelques-uns à Didier. Je viens aussi d'en mettre certains sur ma page Reverbnation (www.reverbnation.com/garyjeffries) où ils sont en téléchargement gratuit.
Vous venez de sortir l'excellent « Middle Class Man ». Y a-t-il longtemps qu'il était en préparation ?
Je pense qu'on peut dire oui : depuis presque vingt ans. Le deuxième morceau sur le CD, « Heaven Winds Blow » était sur le CD d'Asphalt Ballet. Certaines des chansons couvrent vingt ans de ma vie. J'ai fait environ neuf CDs à ce jour et j'ai le sentiment qu'aucun d'entre eux n'a vraiment été assez entendu. Alors, pour « Middle Class Man », j'ai voulu réenregistrer certaines de mes chansons favorites de ces vingt dernières années. Les gens me demandent pourquoi ? Eh bien, je les veux toutes sur un seul CD. C'est en quelque sorte mon « best of ». Par exemple, si on considère que Coup De Ville n'a pressé que 400 CDs, on peut en déduire que bien peu de personnes l'ont entendu. « Free My Soul » est également sur « Middle Class Man ». Asphalt Ballet doit avoir vendu dans les 40 000 exemplaires mais peu de gens ont vraiment entendu « Heaven Winds Blow » ou « Blood On The Highway », de grandes chansons qui sonnaient un peu comme du rock sudiste. J'ai pensé que les gens pourraient les apprécier aujourd'hui. Je les ai donc inclues sur « Middle Class Man ». « I Know Ya Too Well » a été enregistré sur le «  Welcome To Monticello LIVE » d'Alligator Stew mais je voulais enregistrer ce morceau dans un vrai studio. C'est donc ce que j'ai fait et l'ai mis sur mon « Middle Class Man ».
« Bad Moon Rising » par Creedence Clearwater Revival fut l'un des premiers morceaux que j'ai appris quand j'ai commencé la guitare dans ma jeunesse. Ça a toujours été un de mes titres favoris et j'ai pensé que ça ferait une conne reprise pour le nouveau CD. J'ai donc mis sur « Middle Class Man » mes titres préférés du passé avec quelques nouveaux morceaux. Je prévoyais ce CD depuis quelques années. Simplement, je n'ai jamais eu l'argent pour le faire. J'étais trop occupé à payer toutes mes autres factures pour pouvoir en mettre de côté... la nouvelle situation difficile de la classe moyenne. Puis, en octobre 2010 je me suis dit « allons-y ! Je vais dépenser jusqu'au dernier centime pour ce CD. J'en ai marre de payer mes mensualités d'emprunts. Je suis las de payer mes factures d'électricité et de gaz et tout le reste ». J'ai joué le tout pour le tout. J'ai dépensé tout ce que j'avais, ce qui n'est pas beaucoup en comparaison de ce que dépense un label. Cela a entrainé des retards dans mes versements de mensualités sur ma maison. J'ai eu mon électricité coupée une fois et mon eau coupée aussi une fois. J'ai encore pas mal d'appels téléphoniques chaque jour de la part des services de recouvrement. En fait, j'ai branché hier un enregistreur sur mon téléphone pour capturer mes conversations avec ces services de recouvrement. Je vais les mettre sur CD avec de la musique derrière. Ça va pas mal avec le thème de l'homme de la classe moyenne (« Middle Class Man ») puisque nous ne pouvons pas faire face à nos factures. Je vous enverrai un de ces enregistrements un jour. Ils sont drôles !
Gary Jeffries - Scott Redding - Geno Arce
Regrettez-vous d'avoir mis tout votre argent dans le CD et de récolter ces problèmes ?
Oui, j'ai dit que j'avais mis tout mon argent dans le CD et je suis très fier de l'avoir fait. J'étais prêt à mettre mon argent dans ce qui est mon véritable amour plutôt que de le voir constamment rongé par toutes ces dépenses récurrentes merdiques. Je n'ai aucun regret et je le referais si c'était à faire. Je crois toujours que l'investissement que j'ai fait dans ce CD sera payant si le CD bénéficie de passages radio et si les gens lui donnent simplement une chance. Je pense que c'est un de mes meilleurs albums et j'ai y ai inclus certains de mes titres favoris. Alors oui, vraiment, je n'ai aucun regret. Même si j'avais l'impression de me plaindre dans ma dernière réponse... désolé... pas de regrets !
D'après MySpace, vous êtes maintenant basé dans l'Ohio. Les musiciens sont-ils du coin ?
Le batteur est Randy Trent avec lequel j'ai travaillé pendant environ cinq ans. Nous avons joué beaucoup de concert partout dans le Midwest (Indiana, Ohio et Tennessee) sous l'appellation Gary Jeffries Band. À la basse, il y a Steve Fletcher, qui a également joué avec moi partout dans Ohio, l'Indiana et le Tennessee. Lui et moi travaillons ensemble depuis environ cinq ou six ans. Je joue pas mal de guitare et je chante. Ensuite, j'ai ajouté un super lead guitariste soliste du coin pour jouer des concerts. J'aime travailler avec le claviériste d'Alligator Stew, Danny Bierne, qui vit à Columbus, Ohio. Ça fait donc cinq supers musiciens.
Un vrai guitariste de rock sudiste n'est jamais trop metal ou trop country mais joue entre ces deux genres. Ils sont assez rares de nos jours. Pour « Middle Class Man », j'ai appelé un copain et ami de Santa Monica, en Californie, pour venir enregistrer la guitare lead. C'est Monsieur John Goodwin. C'est l'un des meilleurs guitaristes de rock sudiste du pays. Il a enregistré de nombreux CDs et il est bien connu à Los Angeles, en Californie. Quand je viendrais en Europe, je l'emmènerai. J'ai aussi pris un claviériste, Jimmy Rogers, pour jouer les parties de clavier sur le CD.
Les CDs de John Goodwin sont-ils dans un style Southern rock ?
John Goodwin a pas mal de démos dans un style Southern rock. Il a travaillé avec des membres de Thin Lizzy et le batteur de Megadeth. Il a fait des sessions pour de nombreux groupes en s'adaptant à ce qu'ils voulaient mais il est vraiment ancré dans le blues et le Southern rock. John et moi travaillons en ce moment à son prochain CD. Il y a du très bon matériel qui fait penser à du Robin Trower ou à du Mississipi Delta blues. Je vous tiendrais informé.
Avez-vous des projets précis pour venir en Europe ?
Non, pas de projets précis pour l'Europe mais je crois véritablement que si le CD décolle vraiment, nous serons en Europe en 2012. J'aime ce coin ; les gens y ont toujours beaucoup supporté ma musique au cours de ces vingt dernières années. Je parle chaque jour à des gens et à des fans de toute l'Europe, j'ai donc besoin d'aller là-bas.
J'ai retrouvé deux morceaux qui figuraient sur « La. to L.A. mais je n'ai rien vu sur les CDs d'Alligator Stew.
Eh bien, le morceau « I Know Ya Too Well » était sur « Welcome to Monticello LIVE » mais n'avait jamais vraiment été enregistré dans un bon studio de 24 pistes, alors je l'ai enregistré de nouveau. Écoutez « Monticello LIVE », il y est. Les versions peuvent sembler différentes mais elles sont sur les deux. J'adore ce morceau « I Know Ya Too Well ». Il a été influencé par ma femme. Bien sûr, je l'ai rendu plus intéressant en y mettant des paroles un peu folles et exagérées !
Gary Jeffries
En effet, je ne l'avais pas repéré !
Dans vos préférés, Comment avez-vous choisi les morceaux ?
Pendant les concerts du Gary Jeffries Band, je joue habituellement trois heures de compositions - des morceaux d'Asphalt Ballet, Coup De Ville, Alligator Stew et d'autres morceaux provenant de ces vingt dernières années. Quelques-unes plaisent d'avantage au public et marchent bien. Je les ai choisies en fonction de ça. Il y en a d'autres que j'aime simplement chanter.
Le disque est titré d'après mon morceau intitulé « Middle Class Man ». Il raconte surtout l'histoire de la lutte de mes amis et voisins de la classe moyenne du Midwest.
Pouvez-vous nous parler des sessions ?
On faisait tous ces titres lors de nos concerts depuis environ deux ans. Certains devenaient vraiment géniaux. Vers septembre 2010, nous sommes allés dans le sous-sol de mon batteur et j'ai branché mon enregistreur 12 piste bricolé. On trouvait le bon tempo et on écoutait ensuite les bandes pour simplifier ou changer des parties dont nous pensions qu'elles n'allaient pas. Cette pré-production ne nous a rien coûté et nous a permis d'économiser temps et argent avant d'aller en studio. Pendant ce temps, j'avais économisé assez d'argent pour presque vingt heures de temps de studio. Les parties de basse et de batterie ont été finies en onze heures. Il me restait donc neuf heures de temps que je pouvais me permettre, ou plutôt non, pas que je pouvais me permettre, mais que je devais payer de toute façon. Après avoir écouté les prises de batterie et de basse, Ron Pease, du studio Refraze, et moi avons décidé de travailler un peu plus sur la batterie et la basse. Nous avons passé neuf heures de plus là-dessus. J'avais alors mes pistes rythmiques (basse et batterie) enregistrées. « Bien » me suis-je dit, « je suis fauché mais arrêtons de déconner. Je vais finir ce CD même si je perds tout ce que j'ai. » Alors, j'ai arrêté de payer mes factures et je suis retourné en studio pour enregistrer toutes mes parties rythmiques électriques et acoustiques de guitare. Bien sûr, ce processus prend toujours plus longtemps qu'on ne le prévoit initialement. Mais, j'ai mis toutes les guitares (acoustiques et électriques). Ça sonnait bien. Après, il y a eu le chant. J'ai fait beaucoup de « en une prise » là-dessus. Je les connaissais bien et je voulais un son vrai sans un tas d'overdubs. J'ai fini le chant en deux à trois jours. Ensuite, vinrent les harmonies vocales. Ça s'est fait vite. J'ai fait venir d'une église une fille, Kristin Kincaid, qui avait un son gospel sympa. Elle a chanté sur « Free In Heaven », « Southern Pride » et « Middle Class Man ». C'était le premier CD pour Kristin. Il fallait alors un lead guitariste. J'ai auditionné plusieurs guitaristes mais ça ne convenait pas bien et donc, comme dit précédemment, j'ai contacté mon pote, John Goodwin, de Santa Monica. Je lui ai envoyé les fichiers MP3 avec le squelette de base des morceaux. Il a enregistré la guitare lead en environ trois semaines puis il m'a envoyé tout ça. Il a super bien fait ses parties. Elles étaient tellement bonnes. Il avait tout fait dans son propre studio, sur l'ensemble des douze morceaux. Il a ensuite pris l'avion pour l'Ohio et, ensemble, nous sommes allés en studio. En fait, ses prises ont été incorporées directement, il n'a quasiment rien réenregistré. Nous avons alors mixé toutes les pistes ensemble. Cela a pris environ trois sessions de huit heures.
On était prêts pour le mixage final. Cela a pris une bonne semaine à écouter les morceaux et à les retravailler. Je savais que je voulais que le CD soit titré « Middle Class Man ». Après avoir dépensé chaque centime que j'avais, et même plus, sur ce CD et récolté des appels des services de recouvrement tous les jours, j'ai trouvé que ce CD était bien nommé. Star Ruotolo et Nancy Fallon m'ont fait la pochette en temps et en heure. Ils ont beaucoup oeuvré pour ma promotion et m'ont beaucoup aidé pour mon nouveau CD.
Hé, souhaitez-moi bonne chance ! Je dois vendre quelques CD pour sauver ma maison. Non, je plaisante ! Merci à tous pour votre soutien !
Pourquoi ne pas avoir pris votre guitariste et votre clavier (Danny Bierne) habituels ?
Danny Bierne est un de mes claviéristes préférés et je voulais l'avoir sur ce CD mais il était à l'époque tellement occupé à tourner que je n'arrivais pas à le faire venir en studio. Mais il sera sur le prochain album. C'est un des meilleurs. John Andrews, que je considère comme un de mes guitaristes habituels, était reparti sur Los Angeles quand je faisais ce CD et lui aussi n'avait pas le temps d'enregistrer et de composer des parties de guitare pour mon CD. J'ai pensé à plusieurs guitaristes du coin que j'avais eu l'occasion d'embaucher pour des concerts mais ils n'avaient pas beaucoup d'expérience en matière d'enregistrement et d'écriture de parties originales de guitare. Je me suis souvenu que John Goodwin était libre et qu'il cherchait à enregistrer. Il a été là sur le champ. Quel grand guitariste !
Musicalement, comment décririez-vous le style du disque ?
Je pense que c'est une bon CD avec une orientation Southern rock. On peut dire qu'il entrelace mes différents styles : Asphalt Ballet, Alligator Stew et une touche de Coup De Ville. À certains moments c'est assez rock et à d'autres, ça a parfum country. C'est de la vraie musique qui vient du coeur et qui a été faite avec beaucoup de passion. Le dernier morceau sur le CD a pour sujet quatre enfants qui ont perdu la vie trop tôt : « Free In Heaven ». Bien sûr, « Southern Pride » a été écrit quand j'ai quitté Asphalt Ballet. En bref, c'est un CD marquant de Southern rock et qui vous garantit un super voyage.
Gary Jeffries
Gatorjaw est-il votre propre label ?
Oui, c'est mon label, il est tout à fait indépendant. J'espère y mettre d'autres albums.
Cherchez-vous un label plus important susceptible de mieux vous promouvoir et distribuer ?
Oui, je serais ravi de trouver un plus gros label pour promouvoir et distribuer ma musique. Mon intention en mettant le disque sur mon label et en payant les coûts et la production était de pouvoir faire un CD comme je le voulais. J'avais plus de contrôle dessus. Je peux même en retirer plus de bénéfices si c'est sur mon label. Mais je n'ai pas l'argent supplémentaire pour promouvoir le disque et je n'ai pas les connexions d'un gros label. Donc, si je sens que le CD peut devenir disque de platine, j'aurais besoin d'aide pour une vaste promotion et une importante distribution. Si je n'arrive pas trouver un plus grand label, je continuerais à pousser moi-même le disque. Je vais le pousser sur Internet et faire autant de concerts que possible. Je ferai tout en mon pouvoir pour promouvoir ce CD car je crois en lui. J'ai un super site Web, www.garyleejeffries.com, et sa fréquentation va croissante. S'il vous plaît, venez souvent me rendre visite !
Band of Dixie a été d'une grande aide et je l'apprécie.
Parfois, des artistes nous disent qu'ils ont du mal à vendre leurs CDs aux États-Unis et qu'heureusement il y a le Japon et l'Europe. Est-ce votre cas ?
Oui, c'est quelque peu ça. Je pense que les États-Unis sont dans ce que j'appelle les groupes de la « saveur du mois ». Ce sont ces groupes que nous entendons sur les radios grand public dix fois par jour. Ces groupes ont un label qui les impose sur les radios américaines. Parfois, ici aux Etats-Unis, les gens ne s'aventurent pas dans un style populaire du passé.
Le rock sudiste aux États-Unis se conjugue au passé mais la musique country est devenue populaire. Même si une certaine country essaye de ressembler à du Southern rock édulcorée, il y a de la pop country qui nous reste en travers de la gorge. Heureusement, des groupes comme Montgomery Gentry, Van Zant et Kid Rock croisent la country et le rock sudiste et les gens d'ici aiment ça. Ça reviendra peut-être un jour : les Américains aimeront de nouveau le vrai rock sudiste... s'il est toujours là. La France, l'Allemagne, l'Italie et plusieurs pays européens m'ont soutenu pendant des années. Le Japon fait maintenant un bon accueil à mon nouveau CD. J'apprécie ça vraiment beaucoup. Je parle à beaucoup d'amis et de fans européens. Ce sont les seuls à garder le Southern rock en vie et je les remercie ! Ensuite, il y a aussi l'Argentine en Amérique du Sud !
Que pensez-vous de l'influence d'Internet et des problèmes de téléchargement illégaux sur la musique ?
Pour ce qui est d'Internet, j'adore !, Merci à Dieu pour ça. Si Internet n'était pas là, je ne sais pas comment je pourrais faire passer ma musique dans d'autres pays et qu'elle soit entendue par plus de personnes. Ça a été une bouée de sauvetage pour les artistes indépendants. Je ne suis pas un très bon technicien d'Internet mais je m'améliore petit à petit. Ça m'a permis de vous rencontrer. Je discute avec mes fans et mes amis partout dans le monde. Je ne sais pas si je continuerais s'il n'y avait pas Internet. Ça a changé la promotion de toute la scène musicale, ça a brisé une partie du contrôle des majors. J'aime Internet.
En ce qui concerne le téléchargement illégal, ça fait juste partie du jeu. Je préfère que les auditeurs me dépouillent mais qu'au moins ils aiment ma musique plutôt que d'être lié par un contrat avec un gros label qui détiendrait mon âme et chaque centime que je génère. Alors n'hésitez plus et téléchargez-moi mais dites au moins à vos amis comment mes morceaux sont bons. S'il vous plaît !
Gary Jeffries et Geno Arce
Faites-vous beaucoup de concerts ?
Eh bien je pense que je ne joue pas assez. Il est difficile d'obtenir des cachets dans beaucoup de clubs aux États-Unis si tu ne joues pas beaucoup de reprises du top 40. Peut-être devrais-je jouer plus de covers pour obtenir plus de concerts. Les clubs pourraient vous permettre de jouer deux compositions originales par set. Ce serait cool. Huit compositions originales par nuit. Je pense à jouer de la musique et pour bien le faire, je dois jouer de la musique que j'aime. Je n'apprécie pas de jouer des morceaux écrits par d'autres artistes. Certains ne sont pas mauvais mais faire toute une nuit avec des reprises n'est pas mon truc. Je vois des groupes jouer des reprises pendant quatre heures et toutes les dix minutes ou quelque chose comme ça regarder leur montre et dire « Nous n'avons fait que vingt minutes dans ce set ! ». La nuit se prolonge et ils n'ont plus d'énergie. Quand je joue ma propre musique, la nuit file vite, comme une machine qui fonctionne super et je suis dedans ! Je joue encore de huit à quinze dates par mois. En été, je fais beaucoup de rassemblements de bikers et de festivals. Je joue la musique de mon CD actuel et de mes disques passés.
En concert, jouez-vous cependant quelques reprises de standards du rock ?
Je joue à 95% ma propre musique. Je mets quelques classiques du rock sudiste comme du Blackfoot, du Lynyrd Skynyrd, du Molly Hatchet, du Marshall Tucker, du Outlaws, du Charlie Daniels et quelques autres.
Vous avez dû partager durant toutes ces années la scène avec plein de groupes fameux. Quels sont vos souvenirs les plus marquants ?
Je pense que c'était à Reno, au Nevada, quand Alligator Stew a ouvert pour Lynyrd Skynyrd. Rickey Medlocke était sur scène avec nous pour tout le spectacle et puis, plus tard, après le concert, on a fait la fête avec Ricky dans les casinos. Je suis un grand fan de Rickey Medlocke.
Et il y a aussi quand j'étais au concours d'amateurs télé Star Search en 1989 et que j'ai remporté la deuxième place contre le groupe, Little Texas. C'était un rêve devenu réalité. J'ai rencontré Ed McMann et j'ai causé avec le top model Bobbie Brown qui, plus tard, est apparu dans la vidéo musicale « She's My Cherry Pie ».
Quels sont maintenant les projets de Gary Jeffries ?
Je suis actuellement en train de pousser ce nouveau CD, « Middle Class Man », en jouant des concerts pour le promouvoir. Je prévois de faire un clip pour le morceau éponyme. Je suis également en train écrire de nouvelles chansons pour un futur CD. J'en ai trois presque terminées. Je travaille aussi sur un CD au sujet de ces services de recouvrement emmerdants qui appellent chez moi (je ne donnerais pas les noms). Je regarde si je peux faire quelque chose d'intéressant avec tout ça ! Je suis en train d'enregistrer leurs conversations et je vais mettre des pistes musicales derrière ça. Un type de travail pour nous tous, les durs travailleurs de la classe moyenne. Vous ne pensez pas ?
Peut-être le prochain style musical « saveur du mois » ?
Je ne sais pas si ce sera la saveur du mois mais ce sera intéressant. Mon prochain CD sera fait avec uniquement de la nouvelle musique que j'ai écrite ou co-écrite avec d'autres. Je travaille sur un CD avec mon guitariste, John Goodwin, qui est déjà là pour « Man Middle Class ». Il a écrit beaucoup de musique et il a besoin de paroles. Je vais écrire des paroles et des mélodies. Je vous tiendrais au courant.
Quels sont vos albums favoris de rock sudiste ?
Je ne peux me souvenir de tous les titres mais j'ai toujours aimé écouter tous les vieux albums de Lynyrd Skynyrd, Blackfoot - quand Rickey Medlocke chantait avec eux, les premiers Molly Hatchet, Gregg Allman et le « Get Your Wings » d'Aerosmith. Oh, il y aurait trop d'albums à lister.
Merci.
Merci pour le temps que vous m'accordez et pour le soutien à tous les groupes et artistes indépendants. Vous, les gars à Band of Dixie vous êtes Rock et j'apprécie vraiment votre aide et votre soutien !
Merci très sincèrement.
Gary Jeffries
Radio Blues Intense Sweet Home RBA All Blues Dixie Rock